Si il y a bien une chose dont nous pouvons être certains en tant que parents, c’est qu’un jour notre enfant devra faire face à du harcèlement scolaire. Soit en tant que victime, soit en tant que spectateur, bien souvent les deux. A la cours de récréation, dans le milieu scolaire mais aussi professionnel ou dans n’importe quel autre contexte, ils ne seront pas épargnés. Des crétins qui ont recours aux violences verbales, aux intimidations, aux insultes aux moqueries, aux humiliations, aux brimades, nous en rencontrons malheureusement partout et nos enfants auront certainement l’occasion d’en croiser aussi. Que pourraient-ils faire dès lors pour tenter de se sortir de cette situation et ne pas se sentir totalement impuissants ?
Harcèlement scolaire verbal, les enfants victimes ne sont pas totalement impuissants !
Nous entendons depuis des années des « experts » se prononcer sur la question du harcèlement à l’école. Ils mettent en avant ce que l’éducation nationale et l’état de droit devrait mettre en place. En revanche, ils ne nous donnent que peu ou pas de réponse concrète sur ce que nous, parents, pouvons faire pour protéger nos enfants ou du moins comment les préparer à faire face à cette situation qu’ils rencontreront probablement.
Ils envisagent encore moins l’enfant comme capable de réagir en première instance. Attention, je ne dis pas ici que l’enfant ou l’adolescent ne doit pas appeler à l’aide, je dis seulement qu’il y a de petites choses que nous pouvons peut-être leur apprendre et qui les aideront, en complément d’une aide extérieure voir d’une aide légale …
En cas de harcèlement, verbal mais aussi physique ou sexuel, il existe un numéro vert que vous pouvez appeler: 3020.
Vous pouvez également consulter le site du gouvernement.
Alors en tout humilité, voici quelques conseils concrets (parmi d’autres sans doute) et une technique très popularisée aux états-unis qui semble aider les enfants à faire face au problème. Il va sans dire que cela ne concerne que le harcèlement verbal (pas le harcèlement physique).
Harcèlement, les signes qui doivent vous alerter
Il est parfois difficile pour les parents de distinguer entre une dispute isolée et un véritable cas de harcèlement. Les situations de harcèlement ne sont pas toujours facilement repérables. C’est d’autant plus difficile que l’enfant va avoir tendance à camoufler, masquer sa souffrance pour ne pas inquiéter ses proches. Malgré tout, des changements dans le comportement de l’enfant, par exemple un repli sur soi doivent inciter les parents à dialoguer avec l’enfant pour s’assurer que tout va bien.
Quels sont les signes qui peuvent vous mettre la puce à l’oreille (liste non exhaustive).
Signes évidents
Il est évident que si votre enfant revient avec des marques de bleu, griffures, gifles ou autre … il se passe quelque chose. Des livres déchirés, des chewing-gum collés dans ses pages, du liquide renversé sur ses affaires sont aussi des signes d’un problème potentiel…
Développement d’une phobie scolaire
Votre enfant a soudain peur de se rendre à l’école ou vous demande plus d’argent de poche que d’habitude. Le climat scolaire a changé. Il veut tout d’un coup que vous l’accompagniez à l’entrée de sa classe et que vous veniez le chercher à la sortie de l’école. Il fait des cauchemars pendant la nuit, a du mal à se lever le matin. Il pleure le dimanche soir à la veille du début de sa semaine ou au contraire devient irritable voir agressif. Il s’isole, devient soucieux, taiseux ou absent.
Il présente des symptômes physiques inexpliqués (maux de ventre, énurésies, éruptions cutanées, maux de tête, perte de cheveux, dérèglement hormonal pour les filles, retard de croissance …).
Isolement social
Tout d’un coup votre enfant n’est plus invité aux anniversaires. Il ne veut pas fêter le sien à la maison comme auparavant. Il ne reçoit plus la visite de ses amis, ne sait pas qui appeler pour avoir la matière vue pendant son jour d’absence, et ne parle jamais de ses amis.
Échec scolaire
L’enfant qui ne se sent pas en sécurité dans son environnement scolaire va être de moins en moins attentif en classe. ses angoisses vont prendre le pas sur son intérêt pour ce qu’il apprend. Il va également avoir tendance à sécher plus souvent les cours pour éviter de rencontrer ses agresseurs. Il va sans dire que ses résultats scolaires vont tôt ou tard s’en ressentir.
La résilience contre le harcèlement scolaire verbal
Le harcèlement est la volonté d’une personne de nuire à une autre au travers d’actes de violence (verbal dans le cadre de cet article) répétés. Dans le cas d’un harcèlement, il faut d’ailleurs pouvoir faire la preuve que les actes de violence s’inscrivent dans la durée et qu’il ne s’agit pas d’un acte isolé.
« Il faut comprendre le harcèlement scolaire en termes de comportements de domination. Il s’agit d’une personne (le harceleur) qui essaie d’avoir l’ascendant sur une autre personne (le harcelé). Et quand on a compris ce qui est à l’origine même du harcèlement, cela donne plus d’outils pour s’en prémunir ».
Voilà comment Brooks Gibbs introduit sa vidéo qui nous explique de manière très simple comment désarmer le harcèlement scolaire (du moins verbal) quand on en est victime. Cette vidéo vous montre via un jeu de rôle harceleur-harcelé, deux situations différentes : l’une dans laquelle le harcelé montre qu’il est affecté et réagit lui-même agressivement et l’autre dans laquelle les mots du harceleur « tombent à plat » sans atteindre leur cible ce qui décontenance complètement le harceleur.
La clé pour le harcelé est donc de feindre l’indifférence (même si il est affecté en réalité).
En effet, plus le harceleur sent qu’il a de l’emprise sur le harcelé, plus sa motivation de continuer sera grande, son seul but étant de le dominer. Au harcelé donc de montrer que ce que dit le harceleur n’a pas d’emprise sur lui…
Du moins, en apparence … car soyons réalistes, le réel détachement est un état d’esprit qu’un enfant ou un adolescent aura de la peine à adopter, surtout dans une situation de tension inattendue et de fait désagréable. Il peut comprendre les motivations du harceleur, en déduire que le harceleur cherche à le dominer et que ce qu’il dit n’a pas de valeur ni de fondement mais il faudra du temps pour qu’il intègre ces notions. Alors dans un premier temps, il devra sans doute faire semblant et s’aider mentalement (je dirai qu’imaginer son harceleur dans une mauvaise posture serait un bon commencement) pour pouvoir afficher un certain détachement.
Comment feindre l’indifférence ?
Respirer, sourire, répondre posément, avec humour et sans animosité aucune. Le plus simple étant sans doute des phrases standards et neutres qui vont dans le sens de ce que dit le harceleur: « tu as raison…, je suis ceci-cela, tu es tellement plus … que moi»…
Ne surtout pas répondre par l’agression ou la défense, ce qui aura pour effet d’exciter encore plus le harceleur :
- agression : « si tu continues, je vais ceci-cela » ; « toi, tu es … » ; …
- défense : « arrête de… », « pourquoi m’embête-tu ?», « j’en ai marre que tu … »
Le principal est que le harceleur n’arrive pas à déstabiliser le harcelé et qu’il perde l’envie de continuer son jeu de domination.
Brooks Gibbs s’inspire de la « Règle d’Or » d’Izzy Kalman, psychologue reconnu dans le secteur scolaire, qui décrit le calme et la gentillesse comme la réponse la plus efficace à une attaque verbale car elle induit une réelle « crise de conscience spontanée » chez le harceleur qui se retrouve soudain en position de faiblesse.
Si vous désirez en savoir plus, je vous invite à aller consulter son site
Encore une fois, on ne parle ici que de harcèlement scolaire verbal, harcèlement moral également mais pas d’agression physique et/ou sexuel qui demande d’être traitée différemment.
Le groupe, l’union fait la force face au harcèlement scolaire !
L’union fait la force. Se faire épauler par un groupe d’amis est d’une importance capitale. Cela redonnera confiance à votre enfant. Il pourrait même fédérer autour de lui d’autres enfants subissant eux aussi les agissements d’un harceleur ou d’un groupe de harceleurs et contrecarrer ainsi plus facilement les attaques verbales auxquelles il est confronté.
Dale Carnegie a écrit un best seller sur le thème comment se faire des amis. Cliquez ici pour consulter une chronique de ce livre qui a été vendu à des millions d’exemplaires !
Victime de harcèlement, lutter par l’exposition
Face à une peur (fondée ou non), le meilleur remède est de s’exposer de façon graduelle à la situation qui engendre la peur. Par exemple prendre la parole pour un enfant est une source de stress non négligeable (pour de nombreux adultes également d’ailleurs). S’il s’entraîne à intervenir en cours, à faire un exposé devant la classe, etc., votre enfant gagnera en confiance et affichera une certaine aisance qui lui sera bénéfique bien sûr mais qui, de plus, n’échappera pas à son entourage …y compris à un harceleur potentiel ou confirmé.
Plutôt que de se terrer dans un coin après avoir été harcelé, il vaut donc mieux affronter ses peurs et prendre quelques initiatives : prendre la parole, initier des discussions, se joindre à des groupes, participer à des évènements etc.
Prendre confiance pour lutter plus facilement contre le harcèlement scolaire
Bien sûr, face à une situation de harcèlement, la reconnaissance des faits et le soutien des proches et du corps enseignant est essentiel. Néanmoins ceci n’est pas le sujet de cet article et devrait être débattu ailleurs. L’enfant a besoin d’outils pour pouvoir agir sur ses problèmes et les résoudre en totalité ou en partie. C’est la seule façon pour lui d’augmenter son estime de lui et lui donner confiance en ses capacités. Agir à sa place lui envoie le message suivant : « Tu n’es pas capable de résoudre le problème alors je vais intervenir à ta place ».
Bien sûr, certaines limites ne peuvent pas être franchies et si elles le sont, les parents ou les enseignants voir même les autorités doivent intervenir. Cependant, encore une fois, il ne s’agit pas dans cet article de violence physique mais bien de harcèlement verbal.
Le harcèlement scolaire, quelques statistiques
- Le harcèlement semble plus important en primaire (12%) qu’au collège (10%) et au lycée (4%). Le harcèlement débute donc très tôt, chez de jeunes enfants d’où la nécessité d’organiser au plus vite des « conseils de classe », des « cours de citoyenneté », ou de mettre en place d’autres initiatives qui permettent de libérer la parole, d’instaurer un dialogue et d’éduquer…
- En France, 1 enfant sur 10 sera un jour exposé à du harcèlement scolaire (toute forme confondue).
- Il y a autant de harceleurs que de victimes et entre 3 et 4 témoins en moyenne pour chaque situation harcèlement …
- Le cyber-harcèlement est en hausse constante. La cyberviolence à caractère sexuel touchant plus fréquemment les filles que les garçons (sexting, partage non consenti de photos ou vidéos à caractère intime,…).
- 60% des élèves victimes de harcèlement avouent avoir des pensées suicidaires et on compte environ 5 suicides par an pour cause de harcèlement chez les collégiens.
- Les harcelés peuvent devenir eux-mêmes des agresseurs dans 1 tiers des cas.
J’espère que cet article vous aura été utile, encore une fois, il s’agit ici de violences verbales et non de violences physiques.
N’hésitez pas à faire part de vos commentaires et de votre expérience sur le sujet.
Selon certains le harcèlement est devenu un fléau dans les établissements scolaires, il est sans doute temps de donner à nos enfants les moyens de se défendre. La première arme qu’ils peuvent utiliser pour se défendre étant sans doute une confiance solide en eux et la certitude d’être écouté pour sortir de la loi du silence.
Des Outils Pour Apprendre
Harcèlement scolaire – Sources
- Centre Hubertine Auclert.
- Enquête HBSC
- Ministère de l’éducation
- Journée nationale de lutte contre le harcèlement
- Collectif contre les violences et de prévention du harcèlement
- Rapport de l’UNICEF
- Plan de prévention du harcèlement UNIA
Mots-clés:
Formes de harcèlement, lutter contre le harcèlement, communauté éducative, référents, école primaire, violences scolaires, intimidation, harceler, ministre de l’éducation, traitement des situations, harcèlement de rue, sexiste, bizutage, délit, éducatif, …
bonjour Sarah, et merci pour cet article !
je le fais connaître immédiatement, car je sais qu’il va aider beaucoup d’enfants à grandir… au-delà du problème du harcèlement !
Ces idées peuvent vraiment les aider à beaucoup de niveaux !
Merci Marie pour ce commentaire. En effet, je suis convaincue que montrer sa résilience (ou même la feindre) peut aider … jusqu’à un certain point du moins. Il y a un article chronique sur le livre Comment se faire des amis de Dale Carneggie. Il pourra peut-être vous intéresser aussi 🙂
Bravo pour l’article.
Avez-vous pensé à le transmettre à des associations APL (Associations Parents élèves) ?
Bonjour Fédia Rose, merci pour votre commentaire. Vous avez raison, je devrais partager cette approche vers des associations qui ne la connaissent sans doute pas encore. J’avoue avoir parfois peur que le message soit mal compris en ce sens qu’au delà d’un certain seuil il est évident que l’enfant doit à tout prix chercher de l’aide à l’extérieur. Quand les parents vivent cette situation avec leur enfant, ils ont peut-être du mal à réaliser que l’enfant a un certain pouvoir d’action même si il est limité.
Ayant été harcelé adolescent das un internat de jésuites, je n’avais jamais pensé à feindre l’indifférence. Je passais mon temps à me battre dans la cour de récré et aujourd’hui j’adore pratiquer la boxe ! Dommage que je ne sois pas tombé sur ton article à l’époque. Merci
Bonjour Olivier, merci pour votre commentaire et je suis désolée que votre expérience scolaire aie été celle-là! Il est humain de réagir ainsi même s’il semble que cela ne fasse qu’entretenir le jeu de domination que veut instaurer le harceleur. Nous avons un fils de 6 ans avec qui nous nous sommes « entraînés » comme décrit dans la vidéo. Dans une situation réelle il a encore du mal à feindre complètement l’indifférence mais ses réactions sont déjà différentes et ses relations avec les autres enfants se sont sensiblement améliorées. Espérons que les études dans ce domaine évoluent rapidement et donnent des pistes concrètes aux parents et aux enfants.
Merci pour cet article et pour la vidéo très instructive.
Ce sont des recherches Americanines. Sa méthode est assimilées à de l’assertivité.
Avons nous les mêmes recherches en France ?
Depuis toujours je dis à qui veut m’entendre que des ateliers de communication devraient être dispensé depuis le primaire. Ce qui permettrait de vivre dans une société tolérante… Bon J’arrête là….
Mais je trouve que c’est un super sujet à développer.
Bonjour Nadia, merci pour votre commentaire. A ma connaissance, il n’y a pas de recherche semblable en France ou en Belgique malheureusement. Peut-être le Canada, vu sa proximité avec les US, est-il plus avancé que nous sur le sujet ? Cela vaut la peine de poser la question, je vais me renseigner. Effectivement des cours de communication assertive spécifiquement et de bienveillance de façon plus générale, ne seraient pas un luxe mais pour cela aussi je ne pense pas que nous soyons très progressistes 🙁 Peut-être d’autres lecteurs ont des informations à ce sujet ?